mardi 1 mars 2011

Le ballon rond, héros moderne et incompris.

Les joueurs de foot et leurs supporters sont des comiques mal interprétés et des poètes incompris, jugés trop rapidement sans en comprendre les subtilités et sans, en vérité, avoir la grandeur d'âme nécessaire pour atteindre la hauteur de leurs centaines de degrés. L'injustice a encore frappé, samedi dernier, alors qu'Ashley Cole, le latéral de Chelsea, se rendait à son entraînement avec un joujou à air comprimé pour pimenter un peu le quotidien. Ok, une balle perdue a blessé un supporter de 21 ans, mais Ashley ne savait pas que l'arme était chargée. Et Ashley se retrouve avec une potentielle peine de 5 ans de prison.  Trop pas juste.

Voilà, c'est tout. Ah oui, non.



















De toute façon, laissez tomber, c'est pas grave, les joueurs pourront toujours compter sur leurs femmes pour les réconforter.
















Et sur leurs supporters pour... et bien, les supporter.

Les derniers en date:



Grosse concurrence niveau frissons dans le dos et poils qui se dressent avec une vidéo plus ancienne, le Puma hardchorus de la Saint Valentin, des English encore et toujours, les plus émouvants du cru 2010:



Même qu'il leur arrive d'être dépassés par l'émotion que le job leur procure, comme, par exemple, le jour où Mourinho quitte l'Inter de Milan pour le Real Madrid. Après une victoire, il est d'usage d'aller célébrer ça illico presto en Champagne Ardenne. Or, ce soir là, Materazzi s'isole aux alentours du stade Bernabeu pour cacher sa tristesse. Vite rejoint par son entraîneur qui craque comme une filette pd. Regardez comme José remet la tête de Marco dans le creux du cou, là où ça sent bon le parfum et où la peau est douce comme une pêche. Je sais pas ce qu'il vous faut de plus.




S'il fallait critiquer ce monde peuplé demi-dieux, ce serait à la condition, et à l'unique condition de le faire mieux que personne.

"Voici bientôt quatre longues semaines que les gens normaux, j'entends les gens issus de la norme, avec deux bras et deux jambes pour signifier qu'ils existent, subissent à longueur d'antenne les dégradantes contorsions manchotes des hordes encaleçonnées sudoripares qui se disputent sur le gazon l'honneur minuscule d'être champions de la balle au pied. Voilà bien la différence entre le singe et le footballeur. Le premier a trop de mains ou pas assez de pieds pour s'abaisser à jouer au football.
Le football. Quel sport est plus laid, plus balourd et moins gracieux que le football ? Quelle harmonie, quelle élégance l'esthète de base pourrait-il bien découvrir dans les trottinements patauds de vingt-deux handicapés velus qui poussent des balles comme on pousse un étron, en ahanant des râles vulgaires de boeufs éteints. Quel bâtard en rut de quel corniaud branlé oserait manifester sa libido en s'enlaçant frénétiquement comme ils le font par paquets de huit, à grand coups de pattes grasses et mouillées, en ululant des gutturalités simiesques à choquer un rocker d'usine ? Quelle brute glacée, quel monstre décérébré de quel ordre noir oserait rire sur des cadavres comme nous le vîmes en vérité, certain soir du Heysel où vos idoles, calamiteux goalistes extatiques, ont exulté de joie folle au milieu de quarante morts piétinés, tout ça parce que la baballe était dans les bois ?
Je vous hais, footballeurs. Vous ne m'avez fait vibrer qu'une fois : le jour où j'ai appris que vous aviez attrapé la chiasse mexicaine en suçant des frites aztèques. J'eusse aimé que les amibes vous coupassent les pattes jusqu'à la fin du tournoi. Mais Dieu n'a pas voulu. Ca ne m'a pas surpris de sa part. Il est des vôtres. Il est comme vous. Il est partout, tout le temps, quoi qu'on fasse et où qu'on se planque, on ne peut y échapper.
Quand j'étais petit garçon, je me suis cru longtemps anormal parce que je vous repoussais déjà. Je refusais systématiquement de jouer au foot, à l'école ou dans la rue. On me disait : «Ah, la fille !» ou bien : «Tiens, il est malade», tellement l'idée d'anormalité est solidement solidaire de la non-footabilité. Je vous emmerde. Je n'ai jamais été malade. Quant à la féminité que vous subodoriez, elle est toujours en moi. Et me pousse aux temps chauds à rechercher la compagnie des femmes. Y compris celles des vôtres que je ne rechigne pas à culbuter quand vous vibrez aux stades.
Pouf, pouf.
"
Pierre Desproges
16 juin 1986. 
Extrait de "Chroniques de la haine ordinaire"
aux éditions Points catégorie Virgule 
page 163-164.


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